UN SPéCIALISTE NOUS éCLAIRE: QUELLE EST LA MEILLEURE POSITION POUR UN SOMMEIL DE QUALITé?

Qu'on préfère s'allonger sur le dos, le ventre ou le côté, il existe une flopée de théories concernant les bienfaits ou les risques de chaque position. Un spécialiste démêle le vrai du faux et nous rassure.

Sur le ventre, sur le flanc droit, sur le dos avec une jambe repliée contre l'autre, les pieds dépassant des couvertures (pour «réguler la température»), un deuxième oreiller dans les bras... Les positions que nous adoptons habituellement pour dormir varient autant que les motifs de nos draps, des plus sobres aux plus inhabituels. Leur unique (et malheureux) point commun, est le nombre de théories étonnantes concernant les risques que pose chaque option («Ça ne te donne pas mal au ventre de dormir comme ça?», «Il faudrait plutôt s'allonger sur le côté gauche, non?»).

Et pour ne rien arranger, une flopée de créateurs de contenu s'en mêle allègrement sur les réseaux sociaux, affirmant avec force gestuelle que telle posture est incroyablement plus bénéfique qu'une autre. Sur TikTok, par exemple, les mots sleep positions rassemblent plus de 338 millions de posts, alors que de nombreuses vidéos promettent de détailler les «pires positions pour dormir» ou «la seule posture qui vous garantit un sommeil sain». Mais la réalité est souvent beaucoup plus nuancée. Et bien plus rassurante. 

En effet, bien qu'on s'endorme généralement dans la posture qu'on préfère, il s'avère que celle-ci change plusieurs fois, au cours de la nuit, ainsi que l'a confirmé une étude danoise réalisée en 2017: durant l'expérience, les participants ont passé 54% de la nuit sur le côté, 37,5% sur le dos et 7,3% sur le ventre, avec une moyenne d'1,6 changement de position par heure. Et c'est totalement normal: «On ne peut pas maîtriser la position dans laquelle on dort, car tout le monde se tourne instinctivement durant la nuit, pour éviter que les muscles ne soient trop compressés», acquiesce le Professeur Raphaël Heinzer, médecin-chef et directeur du Centre d'investigation et de recherche sur le sommeil (CIRS).

La posture la plus agréable prime

Voilà qui semble contredire une célèbre théorie élaborée en 1970 par Samuel Dunkell, régulièrement reprise sur la Toile (et notamment par la plateforme Sleep Foundation), selon laquelle la position qu'on adopte pour dormir serait révélatrice de notre personnalité. D'après le chercheur, le fait de s'allonger sur le côté (en position fœtale) suggérerait un profil émotif et inquiet, tandis que les personnes qui dorment sur le dos auraient davantage confiance en elles. Enfin, une posture sur le ventre indiquerait un certain niveau d'anxiété et d'impulsivité. Dans ce cas, une personne qui se tourne constamment durant la nuit possède-t-elle chacun de ces traits de caractère? Difficile à dire, pour le moment. D'autres études devront être réalisées, avant de pouvoir établir ce lien de façon claire. 

Mais la véritable question, celle qui intéresse les insomniaques et autres chasseurs de Morphée, est celle de la qualité du sommeil! Comment faut-il s'allonger sur le matelas pour s'assurer de bien dormir, tout au long de la nuit? Une étude publiée en 2023 dans la revue «Sensors» souligne que les facteurs les plus impactants sont la préférence personnelle et la fréquence du changement de position, durant le sommeil: «L'analyse révèle que les participants préférant dormir sur le côté et se tournant moins souvent dans leur lit jouissent d'un sommeil de meilleure qualité», précise le texte. 

Or, il semble impossible de définir une posture idéale qui conviendra à tout le monde, sachant que chaque option possède des contre-indications très précises, s'appliquant à des situations très particulières: 

Dormir sur le dos

Si vous ne présentez aucun trouble du sommeil, la position sur le dos ne pose généralement aucun souci: «Elle n’est problématique que pour les personnes souffrant d’apnée du sommeil, un phénomène qui s’accompagne souvent de ronflements, confirme notre expert. En effet, la gravité fait bouger la mâchoire vers l’arrière et la langue risque alors d’obstruer légèrement la gorge, ce qui demandera davantage d’efforts pour respirer.» 

En outre, le professeur Heinzer indique que ce phénomène peut provoquer des micro-réveils répétitifs (dont on n’a pas forcément conscience) et une baisse de l’oxygénation, particulièrement chez les personnes souffrant d’apnée du sommeil, ayant un peu d’embonpoint ou dotées d’un cou très large.» 

Pour rappel, selon les informations du CHUV, le syndrome d'apnées obstructives du sommeil (SAOS) concerne environ 120'000 personnes en Suisse, bien que seule une partie de ces patients est actuellement diagnostiquée et traitée. Parmi les symptômes, on compte notamment des ronflements sonores, des apnées ou des inspirations brusques (gasping) observées par l'entourage pendant la nuit, une somnolence diurne, un sommeil non réparateur ou une hypertension artérielle. N'hésitez jamais à contacter votre médecin si vous reconnaissez l'un de ces signes caractéristiques. 

Dormir sur le côté

À condition de disposer d'un oreiller adapté à votre morphologie, qui permet à votre nuque et votre colonne vertébrale de s'aligner, le professeur Heinzer ne voit aucun inconvénient à dormir sur le flanc. Voilà une bonne nouvelle pour les 60% d'entre nous qui, selon les chiffres de Sleep Foundation, préconisent la position sur le côté et grimacent à l'idée de se coucher sur le dos. 

La seule situation qui pourrait présenter un risque est la grossesse: «On déconseille aux femmes enceintes de se coucher sur la droite, car le retour veineux vers le cœur peut être endigué, prévient le spécialiste. Sachant que le sang du bas du corps passe par la veine cave inférieure, le fœtus peut comprimer le retour veineux vers le haut, chez une femme qui vit son troisième trimestre.»

De même, les personnes adultes souffrant de reflux gastro-œsophagien (RGO), notamment durant la nuit, pourraient bénéficier d'une posture de sommeil sur le côté gauche, d'après une recherche publiée fin 2023. Celle-ci pourrait en effet apaiser et réduire les symptômes désagréables de cette affection fréquente. 

Dormir sur le ventre

Bien qu'elle ait mauvaise réputation, la position sur le ventre ne présente pas de risque particulier pour la santé, tant que nos voies respiratoires sont bien dégagées et que notre visage n'est pas enfoui dans l'oreiller. Cela requiert toutefois de tourner la tête vers le côté, ce qui peut s'avérer douloureux: plusieurs articles, dont une revue publiée en avril 2024 par l'Université de Californie du Sud, pointent en effet que cette posture est déconseillée aux personnes souffrant de maux de dos, dans la mesure où elle inflige davantage de pression à la colonne vertébrale, en modifiant sa courbure naturelle. En cas d'inconfort, de douleurs dans la nuque ou de lombalgies, n'hésitez pas à vous adresser à un spécialiste, qui vous aidera à ajuster votre oreiller et votre matelas. 

Soulignons en revanche que la position sur le ventre peut s'avérer dangereuse pour les bébés: «Les consignes concernant les nourrissons changent régulièrement, souligne le professeur Heinzer. Actuellement, on recommande de coucher les jeunes enfants sur le dos, pour éviter qu’ils ne s’étouffent dans leurs draps: les nourrissons ne sont pas encore capables de se retourner d’eux-mêmes, ce qui peut être dangereux s’ils sont couchés sur le ventre et que les draps obstruent leurs voies respiratoires.» 

2024-04-23T19:14:03Z dg43tfdfdgfd