ET DIMINUER AU MAXIMUM LES RISQUES POUR LA SANTé: CES 5 HABITUDES QUOTIDIENNES PEUVENT RéDUIRE L’EXPOSITION AUX PFAS

Présentes dans chaque recoin de l’environnement et désormais détectables dans notre organisme, ces polluants attirent l’attention et inquiètent. Des spécialistes proposent plusieurs manières de s’en prémunir au maximum.

Il est impossible de se protéger totalement des PFAS («pifasses»), soit les alkyls perfluorés et polyfluorés. Communément utilisées pour rendre divers matériaux résistants à l’eau et à la graisse, ces substances de synthèse s’invitent à la fois dans l’eau, l’alimentation ou certains objets du quotidien tels que les poêles à Teflon ou les vêtements de ski… Bref, elles sont partout. Et le principal problème, c’est que ces sournoises molécules sont difficiles à déloger, une fois installées: en raison de leur composition complexe et de l’immense quantité de variétés différentes (plus de 12’000 molécules), les PFAS se dégradent très lentement et représentent un casse-tête pour les scientifiques. 

Voilà pourquoi le monde anglo-saxon les surnomme forever chemicals (ou «polluants chimiques éternels»), un terme anxiogène de plus en plus évoqué dans la presse, alors que le phénomène est en passe d’être mieux régulé, grâce à des accords internationaux et au développement d’alternatives potentiellement moins dangereuses. 

En effet, ces substances sont associées à divers problèmes de santé, dont une augmentation du risque de cancer, une baisse de la fertilité et une hausse du cholestérol. Les spécialistes sont toutefois formels: on ne peut pas éviter complètement notre exposition aux PFAS, désormais présentes partout autour de nous, et principalement dans l’eau et l’alimentation. 

De nombreux objets sont concernés

«On retrouve aussi des PFAS dans tous les produits ayant des qualités antiadhésives et imperméables, souligne Lionel Cretegny, responsable des tests comparatifs auprès de la Fédération romande des consommateurs (FRC). Parmi ceux-ci, on compte par exemple les emballages et cartons alimentaires, les farts pour les skis, les câbles électroniques, les textiles imperméables ou traités contre les taches, les ustensiles de cuisine, les lubrifiants et les cires.» Puisqu’il est impossible de bannir la totalité de ces objets de notre vie, la FRC réalise actuellement de nouveaux tests, afin d’identifier les principaux coupables: 

«Il est difficile de pointer du doigt un produit en particulier vu la multitude de molécules fluorées existantes et leur utilisation souvent non déclarée, tempère notre intervenant. On les retrouve aussi dans les œufs et l'eau potable qui sont les principales sources, en raison de contaminations. Ce n'est pas le cas des produits industriels, dont les PFAS sont ajoutées directement par les fabricants.» 

Certains gestes quotidiens peuvent néanmoins réduire, dans la mesure du possible, notre exposition à ces substances: 

1. Varier notre alimentation

«Sachant que les contaminants sont présents partout, le plus important est d’éviter une accumulation de la même molécule, pointe Federica Gilardi, responsable adjointe de l'Unité Facultaire de Toxicologie du Centre Universitaire Romand de Médecine Légale (CURML) du CHUV et des HUG. C’est surtout l’accumulation qui peut engendrer des problèmes de santé.»

Pour cela, l’experte conseille de varier au maximum son alimentation, en évitant de consommer trop souvent des gros poissons, qui peuvent contenir une haute concentration de polluants: «À l’état actuel des connaissances, on pense qu’une des voies principales d’exposition aux PFAS est l’eau, notamment pour les personnes qui habitent autour des sites industriels, où le niveau de ces molécules peut s’avérer assez élevé, explique-t-elle. Une autre voie importante est la nourriture et particulièrement le poisson.» 

En effet, puisque ces molécules se dégradent très lentement, elles s’accumulent dans la chaîne alimentaire: notre experte rappelle ainsi qu'on les retrouve même dans le sang des ours polaires, qui vivent pourtant dans un environnement très éloigné des sites industriels: «En effet, certaines de ces substances sont volatiles et peuvent être transportées sur de longues distances dans l'air. Les personnes qui mangent beaucoup de gros poissons, comme le thon, sont donc potentiellement plus exposées: comme les gros poissons mangent les petits, les taux sont plus élevés dans les premiers.» 

En ce qui concerne la contamination de l’eau potable, les personnes inquiètes peuvent demander un rapport de qualité (toutefois coûteux) auprès des services industriels, afin de vérifier si tout est dans les normes. 

2. Imperméabiliser nos chaussures à l’extérieur

Bonne nouvelle: Federica Gilardi constate que l’accumulation au travers de la peau, c’est-à-dire en touchant des matières contenant des PFAS, semble être faible. «L’inhalation pourrait cependant jouer un rôle, surtout pour les personnes qui travaillent dans des usines», prévient-elle. 

Pour cette raison, les produits contenant des PFAS, tels que certains produits de nettoyage devraient être utilisés le moins possible, surtout à l'intérieur. En outre, l’experte rappelle qu’il est essentiel de vaporiser votre imperméabilisant (sur vos chaussures, par exemple) à l’extérieur, afin que les substances ne soient pas libérées en trop grande quantité dans votre lieu de vie. 

3. Prendre soin de nos poêles

Symboliquement associées au phénomène des PFAS, les poêles antiadhésives ont été fréquemment vilipendées. Or, elles ne sont de loin pas les seules responsables du problème, parmi les objets du quotidien: «Pour réduire au maximum notre exposition, il convient d'éviter les poêles antiadhésives abimées et d'éviter les produits dont la composition indique la présence de PFAS (comme les matériaux de type Goretex ou Teflon), ou encore certains fils dentaires cirés», liste Lionel Cretegny. 

En ce qui concerne les poêles, ce sont effectivement les rayures et autres marques d’usure qui doivent alarmer: «Honnêtement, si une poêle est intacte, il n’y a pas trop de risque de détachement de ces substances, estime Federica Gilardi. Il faut toutefois veiller à ne pas l’abîmer avec des ustensiles pointus ou métalliques et veiller à ne pas l’utiliser si sa surface présente des trous ou des microfissures.» Un autre conseil largement répété est de ne jamais placer une poêle au Teflon dans le lave-vaisselle: tout ce qui risque d'abîmer sa surface augmente la potentielle exposition aux PFAS. 

Le Dr. Florian Breider, chef d'unité au laboratoire central de l'environnement de l’EPFL ajoute par ailleurs qu’une poêle peut émettre certaines PFAS sous forme gazeuse lorsqu’elle est chauffée: «Mais celles-ci sont assez rapidement dissipées et il ne s’agit pas de la principale source d’exposition, bien qu’on en parle souvent.»

4. Éviter l’accumulation de cosmétiques

La question des crèmes, lotions et autres produits de maquillage est plutôt complexe, puisque les PFAS ne sont pas nécessairement indiquées dans la composition (parfois illisible) de ces articles. Nathalie Chèvre, écotoxicologue à la Faculté des Géosciences et de l’Environnement de l’Université de Lausanne, souligne notamment que ces substances sont présentes dans le maquillage waterproof et certainement dans les produits pour les ongles, ainsi que les faux ongles, puisque ceux-ci ont pour mission de résister à l’eau. 

Une fois de plus, l’une des seules solutions consiste à éviter l’accumulation, en limitant le nombre de produits appliqués chaque jour sur la peau et en se tournant vers des compositions plus simples, renfermant moins d’ingrédients. «Au niveau des cosmétiques, on ne peut pas faire grand-chose, hormis éviter de surconsommer des produits superflus et de mettre en place des réglementations plus strictes au niveau des industries», commente le Dr. Breider. 

6. Viser une plus grande simplicité

«Le fait d’aller vers une plus grande sobriété, de manière générale, permet de réduire son exposition aux substances chimiques potentiellement dangereuses pour la santé humaine, poursuit notre expert. On peut limiter notre exposition aux produits perfluorés en réfléchissant davantage à notre consommation et en ayant une mode de vie plus sobre. Notons cependant que ces substances restent difficiles à éviter, même si on détient de plus en plus de données à leur sujet. Une personne utilisant uniquement des produits trouvés dans la nature serait quand même exposée aux PFAS: on ne peut pas y échapper totalement.» 

Or, une plus grande simplicité permettra aussi de limiter l’accumulation, qui semble constituer le nerf de la guerre: «Dans le cas d’une personne qui ne vit pas dans un 'hot-spot' de pollution, on a plutôt affaire à une exposition légère, diffuse et continue, précise notre intervenant. Le potentiel de bioaccumulation de ces substances n’est toutefois pas anodin, dans le sens où il contribue à l’accumulation de ces composés dans certains organes et peut aboutir au développement de certaines maladies.»

Et c’est surtout aux industries qu’incombe la responsabilité du changement, là où il est possible: «Certains usages, dans le domaine médical par exemple, ont absolument besoin de ces substances, reconnaît le Dr. Breider. Maintenant, les différents secteurs industriels doivent surtout réfléchir aux alternatives et se demander où les PFAS sont encore réellement indispensables.»

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