ENDOMéTRIOSE : QUELS SONT LES IMPACTS SUR LA QUALITé DE VIE ET LA SANTé MENTALE ? LES CONSEILS D'UN GYNéCOLOGUE

L’endométriose est une pathologie pouvant prendre plusieurs formes et toucher diverses zones de l’organisme. Ainsi, les différentes douleurs ressenties peuvent avoir un impact sur la qualité de vie au quotidien et sur la santé mentale.

L’endométriose n’est pas facile à diagnostiquer et nécessite parfois l’expertise de plusieurs spécialistes comme un gynécologue, un sexologue, un médecin généraliste, un urologue ou même un ostéopathe ou kinésithérapeute. En effet, les douleurs ressenties peuvent se situer à différents endroits de l’organisme, faisant de cette pathologie la base d’une longue série d’impacts sur la qualité de vie et sur la santé mentale. Des règles très douloureuses, une fatigue chronique, des troubles digestifs, des douleurs pendant les rapports sexuels, des saignements anormaux, des troubles urinaires… Pierre Panel, chirurgien gynécologue au Centre expert endométriose de Versailles, détaille les retentissements de cette maladie sur la vie quotidienne des patientes.

Endométriose : douleurs et prise en charge

Des règles très douloureuses, une fatigue chronique, des troubles digestifs, des douleurs pendant les rapports sexuels, des saignements anormaux, des troubles urinaires : ce sont autant de “premiers symptômes” listés par une enquête EndoFrance de 2020 menée auprès de 1550 patientes, leurs proches et 1000 personnes extérieures à la maladie. Avant d’être prises en charge avec le bon diagnostic, on estime que les femmes voient en moyenne 3,5 professionnels de santé, et attendent un an avant de consulter. Ensuite, il leur faut 6 ans de plus pour recevoir le diagnostic. Et ce, alors qu’elles souffrent (là encore en moyenne) à 7,8 sur 10, sur l’échelle de la douleur.

L’impact psychosocial et psycho affectif de l’endométriose

Le docteur Pierre Panel commence par évoquer l’impact psychosocial de cette maladie. Ce dernier se déploie sous différents axes autour de la non reconnaissance de la maladie. Que ce soit par les proches, par les médecins eux-mêmes, ou encore au travail. L’enquête EndoFrance révèle que 4,3 femmes sur 10 estiment que leur vie professionnelle s’en ressent. Le fait de se lever tôt le matin, de réunir ses capacités intellectuelles et physiques pour travailler, d’être motivée, de gérer son stress comme sa concentration… L’endométriose pénètre tous les tissus du domaine professionnel et le complique grandement. Sans toujours être comprise par son entourage, qui minimise les douleurs au simple fait “d’avoir mal au ventre pendant ses règles”. Le gynécologue souligne que “cela vient avec son corollaire : les patientes finissent par penser qu’elles sont “folles”, par avoir un sentiment de culpabilité, par effectuer un repli sur elles-mêmes”.

Il précise aussi que dans le cas où une femme déclare les symptômes très tôt, pendant l’adolescence, l’impact sur le développement affectif peut être important. “L’adolescence est le moment où l’on acquiert une forme de maturité affective et relationnelle. Je remarque avec les patientes qui ont vécu un repli sur soi à ce moment clé de leurs vies qu’elles arrivent à l’âge adulte avec un développement psycho-affectif freiné, souvent très entourées de leurs mères.”

Endométriose : quel est l’impact sur la mobilité ?

Les douleurs d’endométriose ne se limitent pas à des règles douloureuses, elles sont parfois si puissantes qu’elles atteignent la capacité à se mouvoir. “Beaucoup de femmes témoignent de douleurs qui irradient dans le dos, dans les jambes. Et cela entraîne un phénomène de contracture musculaire, avec un dos qui se bloque, des jambes qui se figent, ou chez certaines des jambes qui “lâchent”. Ne plus pouvoir se déplacer et vivre normalement fait partie des impacts de l’endométriose”, précise le gynécologue.

L’impact de cette pathologie complexe sur la vie intime des femmes

L’endométriose modifie le rapport à la sexualité et peut entraîner des douleurs lors des rapports sexuels. 5,5 femmes sur 10 en témoignent dans l’enquête EndoFrance, qui conclut que cet impact est “fort” surtout chez les femmes qui souffrent d’une atteinte profonde. Pierre Panel précise que dans certains cas où les douleurs se seraient installées dès le début de la sexualité, “le cerveau branche alors la sexualité avec la douleur plutôt qu’avec le plaisir. Notre cerveau primitif est très puissant dans le sens plaisir/déplaisir. Si on connaît une sexualité avec du déplaisir, soit on n’y retourne pas, soit le corps nous protège via un phénomène de réflexe en contractant les muscles du périnée dont le relâchement est essentiel pour les rapports sexuels. Le vagin ne lubrifie pas, ne s’ouvre pas, et peuvent en découler de micro déchirures, c’est un cycle infernal très compliqué à détricoter”, remarque-t-il.

Par contre, si la patiente a connu une sexualité initiale épanouie, et qu’elle a ensuite subi des douleurs du fait de son endométriose, “il est plus facile de revenir sur le chemin du plaisir sexuel lorsque les traitements sont mis en place”.

Outre la sexualité, le médecin note qu’on oublie souvent l’impact digestif lié à l’endométriose. “Les femmes témoignent de troubles très importants, comme par exemple d’impériosité anales, de nausées, de ballonnements,...” Dans le rapport EndoFrance, ce sont d’ailleurs les patientes avec une atteinte profonde et digestive, qui sont les plus nombreuses à avoir des difficultés à tomber enceintes : 62%, et 46% d’entre elles ont eu recours à la PMA. D’ailleurs, “plus d’une femme sur deux concernée par l’endométriose déclare avoir déjà eu des difficultés à tomber enciente”. L’endométriose atteint même les projections de la vie de couple et de parents.

Les différentes prises en charge pour améliorer la qualité de vie des patientes

“On avance vers une prise en charge plus complète de ces impacts. Les deux points essentiels de cette maladie sont d’ailleurs la fertilité, et la qualité de vie, nous nous accordons tous là-dessus”, note le gynécologue qui a commencé ses travaux à ce propos dès 2007.

“Avec mes patientes, on discute de l’impact sur leur qualité de vie, des symptômes, de leur éventuel désir de grossesse. C’est là-dessus que l’on se base pour les propositions thérapeutiques. Je ne dis jamais “il faut que”, on fait en fonction du vécu de la patiente. On fait ensuite des examens complémentaires pour connaître l’importance de l’endométriose, pour connaître l’état de la réserve ovarienne aussi. Et on discute d’un programme qui peut s’étaler sur plusieurs années, avec un traitement médicamenteux combiné à un traitement non médicamenteux dans un premier temps. A Versailles, nous avons développé une hospitalisation de jour pour les patientes qui en sont atteintes, avec des programmes adaptés. Elles peuvent y consulter une psychologue, une sophrologue, un kiné, y pratiquer des cours de yoga, y recevoir des conseils en matière d’alimentation, voir une infirmière spécialisée, un médecin de la douleur, un ostéopathe… En deuxième option, on propose aussi des traitements hormonaux, et en troisième intention il est possible d’avoir recours à de la chirurgie.”

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