VOICI COMMENT FONCTIONNE L'APPAREIL LE PLUS CONTROVERSé DU PELOTON

On dit de lui qu'il transforme les coureurs en robot et qu'il cause des chutes, mais le compteur GPS est aussi un petit bijou de technologie au service de la performance.

C'est un petit boîtier noir, fixé au centre du guidon de chaque coureur, et relié à un capteur de puissance installé sur le vélo (lire plus bas). On l'appelle compteur GPS ou ordinateur de bord. Plusieurs fabricants ont investi le marché, si bien qu'il en existe de différentes marques, mais le principe de fonctionnement est toujours le même: l'écran révèle en direct, c'est à dire pendant la course, une foule de données très précieuses au coureur (watts, fréquence cardiaque, etc.). Ce dernier peut ainsi mieux gérer son effort, et donc être plus performant sur la durée d'une épreuve, pour autant qu'il la termine. Car l'outil est accusé de distraire des coureurs rivés sur l'écran, les exposant aux chutes. Ses détracteurs disent aussi de lui qu'il a transformé les cadors du peloton en robots dont chaque coup de pédale est conditionné par les chiffres transmis en direct.

Mais si beaucoup ont un avis sur le sujet, peu savent véritablement comment fonctionne l'appareil. Pour le savoir, nous avons pris rendez-vous avec Simon Meier, mécanicien de la formation Swiss Cycling, engagée cette semaine sur le Tour de Romandie. Ce choix n'a pas été fait au hasard: l'équipe suisse est invitée chaque année sur la boucle romande pour mettre en lumière sept espoirs nationaux sous contrat avec d'autres formations le reste de la saison. Chaque coureur débarque donc pour une semaine avec son propre vélo... et son propre compteur.

Il ressemble à ça:

«Rouler avec son appareil est primordial car celui-ci est calibré pour chaque coureur, intervient Simon Meier. Il peut y avoir en effet des différences de résultats entre deux capteurs neufs: lorsque vous développez 400 watts, l'un peut afficher 400 et un autre 390. C'est un peu comme lorsque vous faites la même randonnée avec un ami et que votre téléphone présente une différence dans le nombre de pas. Pour que le chiffre du capteur de puissance corresponde à la réalité, l'entraîneur configure l'appareil en fonction du coureur. Ce dernier sait aussi, à force de rouler, comment son ordinateur de bord va répondre dans tel ou tel effort.»

Il n'y a pas seulement des différences intrinsèques entre les dispositifs; il y en a aussi dans la façon dont ceux-ci collectent les datas du cycliste. Le «capteur» proprement dit peut en effet se trouver dans le pédalier, dans l'axe de pédalier ou dans chaque pédale.

C'est avec un appareil de mesure dans les pédales que l'athlète obtient le plus grand nombre d'informations. «Ce dispositif permet de savoir quelle puissance le coureur développe dans chaque jambe, l'idéal étant que la gauche et la droite soient parfaitement équilibrées», explique Simon. Mieux encore: le dispositif détecte si la chaussure est trop inclinée vers l'avant ou vers l'arrière, sachant que c'est en poussant avec la plante du pied que l'énergie «traversera» le mieux la pédale.

Ces données sont transmises en direct au cycliste, mais elles sont surtout utiles aux entraînements. En course, le coureur est attentif à d'autres paramètres: les watts, la fréquence cardiaque ou encore les coordonnées GPS. Celles-ci permettent d'anticiper les virages dangereux, de bien se placer avant des montées sèches ou des descentes techniques, ou encore de savoir où sont situées les zones de ravitaillement.

Chaque coureur peut configurer son écran d'accueil, c'est à dire sélectionner les données qui y apparaissent. C'est un peu comme sur un téléphone, lorsque vous choisissez vos applications préférées. Pour obtenir des datas supplémentaires, le cycliste doit appuyer sur un bouton directement sur l'appareil ou, si son vélo est équipé des dernières technologies, presser sur des leviers situés aux extrémités de son guidon (exactement de la même façon qu'il changerait de vitesse). Cette deuxième solution lui permet de garder les deux mains sur son vélo, et donc un meilleur contrôle lorsque le peloton devient nerveux et que ça «frotte».

Chaque coureur allume son compteur au départ réel de la course et l'éteint sitôt après avoir franchi la ligne, de sorte à ce que les données enregistrées reflètent les efforts en course, et ne soient pas parasitées par les secondes d'inactivité qui suivent l'arrivée. Un mode opératoire qui a suscité la polémique ce printemps.

Ce geste fait jaser: «On a robotisé les coureurs cyclistes»

Si les données sont fiables, c'est parce que la plupart des dispositifs sont connectés par satellites. Ils fonctionnent ainsi partout dans le monde, en haute montagne comme sur des routes de campagne, et par tous les temps. Le froid a tendance à solliciter la batterie, mais celle-ci a une autonomie de 8 à 9h, ce qui est amplement suffisant pour terminer la course. Seule la pluie peut jouer des tours au coureur mais là encore, les fabricants ont pensé à tout. «Les gouttes peuvent "presser" sur des touches par erreur. Pour éviter cela, le coureur peut désactiver l'option tactile», renseigne Simon Meier.

Le mécanicien fait partie des défenseurs de la technologie. Il pointe un avantage méconnu du capteur de puissance: «Parfois, quand vous êtes derrière un adversaire réputé plus fort et que vous le voyez piocher alors que vos datas vous indiquent que vous n'êtes pas en sur-régime, vous savez que l'autre n'est pas dans un grand jour et vous pouvez placer une attaque.»

Il faut toutefois se méfier d'une lecture simpliste des chiffres. Pour en avoir une idée crédible, le coureur doit prendre en considération les éléments qui peuvent affecter ses résultats. Développer 400 watts avec un vent de face et une température fraîche n'a pas le même valeur qu'en plein été avec un vent dans le dos, «mais les coureurs s'entraînent tellement qu'ils savent interpréter les données en pleine course», intervient Simon.

Par le passé, on disait d'un bon coureur cycliste qu'il savait faire corps avec sa machine; aujourd'hui, le corps est toujours bien calé sur le vélo mais l'esprit, lui, est ailleurs, tout entier tourné sur un petit boîtier noir fixé au centre du guidon.

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