MAIS ILS VEULENT QUE DU SEXE: INTERNET GROUILLE D'HOMMES DOUTEUX QUI PROPOSENT UN DON DE SPERME AU COUPLE DE FEMMES

Depuis 2022, le don de sperme est ouvert aux couples de femmes en Suisse. Pourtant, beaucoup cherchent un donneur privé sur internet. Et rencontrent des hommes douteux qui ne veulent souvent qu'une chose: du sexe.

A première vue, Ben Beo semble normal: un entrepreneur de la région de Berne, 48 ans, 1,76 m, sportif. C'est ainsi qu'il se décrit sur internet. Sa photo de profil Facebook, sur laquelle il pose torse nu avec un marteau, un smiley géant cachant son visage, laisse perplexe. Ben Beo est un nom d'emprunt. L'homme veut rester anonyme. Nous avons voulu savoir pourquoi.

Sur Facebook et des sites spécialisés, Ben Beo propose son sperme aux femmes qui souhaitent avoir un enfant. Selon ses propres dires, il a conçu cinq enfants de cette manière. Il y décrit sa méthode préférée en juin 2023: «Si nous le faisons de manière naturelle, je renonce à la compensation.» La manière naturelle, c'est le sexe. Après la «mise en cloque», écrit-il encore, il ne veut plus de contact, «puisque je suis en relation.» Mais une telle pratique n'est pas autorisé en Suisse. Les enfants ont le droit de savoir à 18 ans qui est leur géniteur.

Quand le don privé tourne à la catastrophe

Le nombre d'enfants nés d'un don de sperme est en augmentation. Selon l'Office fédéral de la statistique, il y a six ans, 3661 bébés étaient issus de dons dans des cliniques de fertilité de notre pays, en 2022, ils étaient déjà 4524. Mais le nombre de cas non déclarés est encore plus élevé. Loin des cliniques, un marché de dons de sperme privés douteux se développe sur la toile.

Blick donne un aperçu des conséquences: ce couple de femmes, les Gerber (nom modifié) qui vivent en Argovie, mais aussi d'autres couples, sont tombés dans le piège du donneur de masse allemand Martin W.. Il ne leur a pas dit qu'il avait un handicap, qu'il était épileptique et souffrait d'une maladie intestinale chronique. Malheur: certains de ses enfants ont hérité de problèmes de santé.

Ben Beo a également contacté les Gerber. Ces dernières n'ont pas voulu de ses services. Tamara Gerber explique: «J'ai trouvé effrayant que le don soit pour lui un fétiche.» En effet, l'homme se serait confié dans ce sens. D'autres femmes racontent la même chose sur les forums Facebook. Nous avons voulu en savoir plus, mais en réponse à notre demande, Ben Beo écrit : «Comme j'aime être discret et le rester, je ne donnerai aucune information.»

«Un certain risque»

Les spécialistes observent cette évolution d'un œil inquiet. L'avocate Karin Hochl est spécialisée dans la procréation médicalement assistée. «Nous avons encore beaucoup de consultations pour des dons de sperme privés», précise-t-elle. Bien que depuis 2022, les couples de femmes aient aussi accès à un don de sperme dans les cliniques de fertilité. Dans le cas d'un don de sperme privé, poursuit-elle, on s'expose à «un certain risque».

Le phénomène est connu des spécialistes de la médecine de la reproduction. Peter Fehr, de la clinique zurichoise OVA IVF, entend régulièrement dans ses entretiens avec des couples «qu'ils ont d'abord essayé sans succès un donneur de sperme privé». Certains auraient fait de mauvaises expériences. Dans un cas, un donneur aurait harcelé un couple après le premier enfant.

Un problème persiste: le droit suisse ne réglemente pas le don de sperme privé. Karin Hochl précise: «Selon la loi, le donneur serait le père légal.» Les autorités attendent de lui qu'il reconnaisse la paternité de l'enfant.

Les cliniques de fertilité vérifient les donneurs

Les dons de sperme officiels via les cliniques de fertilité sont plus sûrs. Celles-ci sont soumises à la loi sur la procréation médicalement assistée. La paternité du donneur est exclue. Même un cas comme celui de Martin W. n'y serait pas possible. Les conditions imposées aux donneurs sont strictes.

Huit cliniques en Suisse gèrent un programme de don de sperme, l'autorisation étant délivrée par les cantons. L'une d'entre elles est celle du médecin Peter Fehr, qui assure bien «sélectionner nos donneurs». Les médecins interrogent et examinent les candidats sur leurs maladies et des précédentes opérations. Ils les testent plusieurs fois pour les maladies infectieuses, les contrôlent pour des maladies héréditaires fréquentes.

D'autres facteurs sont également décisifs: la qualité du sperme, l'apparence, l'âge, la formation et la motivation du donneur. L'argent ne doit pas être un critère, c'est pourquoi les donneurs reçoivent au maximum 2000 francs pour l'ensemble de la procédure. Seuls trois candidats sur dix parviennent à intégrer le programme.

Mais peu importe que l'on conçoive un enfant avec son partenaire ou que l'on prenne le sperme d'un étranger, il y a toujours un risque résiduel. Peter Fehr confirme toutefois: «Nous offrons une sécurité médicale, mais pas la garantie d'un enfant en bonne santé.»

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