IL TRAQUE LES USINES SECRèTES DE ZARA ET DE DIOR

Will Lasry dévoile ce que l'industrie textile veut cacher. Le créateur de mode publie des vidéos qu'il tourne chez les sous-traitants des grandes marques.

Will Lasry est créateur de mode. Sa marque, Wun-off, propose du streetwear. Pourtant, sa notoriété, le Montréalais âgé de 25 ans, la doit aux contenus qu'il publie sur TikTok, Instagram et YouTube. Comme un enquêteur, le jeune homme se fait filmer pendant qu'il visite des usines de confection textile pour présenter l'envers du décor. Entre les couturières, le bourdonnement des machines à coudre, les prototypes et les chutes de tissus, il passe tout en revue.

Il se rend en Chine, au Japon, en Turquie ou en Colombie pour se renseigner sur le coût de production des vêtements des marques de fast fashion et des griffes de prêt-à-porter de luxe telles que Dior et Gucci.

«Je fais ces vidéos pour présenter les meilleures usines et permettre aux petits créateurs d'accéder à des sites de production de premier ordre. Ainsi, ils pourront aussi confectionner des produits de qualité», explique-t-il à «20 minutes». Traçabilité et transparence sont des notions indissociables. C'est pour ça que, sur son site nommé Glass Factory (l'usine de verre), il partage avec sa communauté les coordonnées des meilleurs sous-traitants.

Nombre de grandes marques de mode désapprouvent sa démarche. Jusqu'à présent, la plupart d'entre elles ont toujours gardé secrets les lieux de fabrication. «Elles veulent conserver le monopole et éviter que les petits labels fassent appel aux mêmes confectionneurs», indique Will Lasry.

L'explication des faibles coûts de production de Zara

Dans l'une de ses vidéos virales (3 millions de vues sur TikTok), Will Lasry s'entretient avec un fournisseur de Zara, dans la province chinoise de Zhejiang. Quand il lui demande quel est le coût de revient d'une veste, l'entrepreneur répond: «Pour un minimum de 1000 pièces commandées, environ 15 francs». Dans les boutiques Zara, cette même veste est vendue environ 50 francs.

Zara, filiale d'Inditex, passe commande de quantités bien plus importantes à un prix nettement moins élevé. «Il y a une énorme différence entre commander un million de pièces ou seulement 200. C'est pourquoi des géants comme Inditex peuvent se permettre de fabriquer un tee-shirt au Bangladesh pour 1 franc 80», explique Will Lasry. Inditex, qui refuse de s'exprimer à ce sujet, n'a pas non plus souhaité répondre à nos questions relatives à la politique de prix pratiquée.

Si Inditex était plus transparente, je n'aurais pas de problème avec les marges élevées

«Si l'entreprise était plus transparente, je n'aurais pas de problème avec les marges élevées. La qualité et la durabilité du produit doivent rester traçables par le consommateur», dit-il.

Percer les secrets des marques de luxe

Les marques de luxe comme Gucci, Dior et Fendi cachent les lieux de fabrication de leurs produits. Will Lasry a néanmoins réussi à visiter, au Japon, l'usine Yamazaki Knit, spécialisée des articles en mailles. Selon lui, l'usine est impeccable et prête à accueillir les commandes de nouveaux clients.

Mais comment Will Lasry fait-il pour trouver ces usines, alors qu'elles sont souvent tenues de taire toute information relative à leurs clients? «C'est un véritable travail de détective. Je me renseigne auprès de nombreux amis dans le milieu. Entre-temps, je suis devenu ami avec beaucoup d'autres créateurs, mais aussi avec des propriétaires de grandes marques de mode», explique-t-il. Ceux-ci lui donnent accès aux usines. «Je passe onze mois de l'année à parcourir le monde pour visiter des usines. Je ne m'arrêterai pas tant que la confection textile ne sera pas plus transparente.»

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